mardi 21 avril 2009

Je suis coupable d’abus du système…


J’ai quitté Bamako vendredi matin le 10 avril pour me rendre à Cotonou sur les ailes de la compagnie aérienne du Mali. Et oui ! Me voilà encore avec ce magnifique MacDonald Douglass plus vieux que moi! Cette fois-ci par contre, le vol fut plutôt calme et l’arrivée sans aucune turbulence, du moins dans l’avion…


Dans mon super guide sur l’Afrique de l’ouest, il est clairement indiqué qu’il est possible, pour le Bénin, de se procurer un visa à la frontière. J’ai donc assumé qu’à mon arrivé à Cotonou il y aurait un bureau des visas, que je paierais le montant demandé, que l’on estampillerait mon passeport et que je pourrais tout bonnement aller dépenser mon argent au Bénin. Et bien non, c'était pas si simple! Voici comment ça c'est passé. Arrivé aux douanes, le garde me demande si j'ai mon visa. Je lui réponds que j’ai cherché le bureau des visas et que je ne l’ai pas trouvé. Il retient alors mon passeport et me dit de me présenter au poste de police à l’extérieur de la zone d’arrivée.




Vous vous dites que je suis probablement dans mer… jusqu’au cou là hein? Mais non! Je suis attendu chez la famille Adjahi et il y a Frank, un cousin d’Isabelle qui m’attend dans le lobby de l’aéroport. Je lui explique la situation et je me pointe au bureau de police. L’agent qui n’a jamais voulu me donner son nom commence à me dire qu’il faut un visa pour rentrer au Bénin, que mon guide est erroné et qu’ils ont reçu une formation spécifique sur ce genre de situation. Je lui dis très calmement que je suis maintenant ici et je lui demande les solutions possibles. Sa première réponse ne me satisfait pas vraiment car il me propose de prendre le prochain vol pour quitter le pays…


Pendant ce temps, tout près un français semblait pris dans la même situation que moi, mais lui semblait beaucoup moins calme que je pouvais l’être. Au bout de quelques minutes, je le vois déposer des billets sur la table et la situation semble s’améliorer. Je me dis qu’au pire je devrai payer et que tout rentrera alors dans l’ordre ; c’est le montant que je risque de débourser qui me rend un peu mal à l’aise. Mon nouvel ami Frank pour sa part, s’activait sur le téléphone pour rejoindre M. Adjahi et lui expliquer la situation.


Et voilà que l'intervention divine opère! L’officier de police reçoit un appel et l’expression de son visage change complètement. Un peu furieux, il me demande de remplir une carte de séjour et de me présenter au bureau d’immigration le mardi suivant, long weekend de Pâques oblige, pour faire ma demande de visa. On a quand même retenu mon passeport, mais au moins j’ai pu rentrer dans le pays. Fiou! Bienvenue au Bénin!


Situation similaire lors de ma demande de visa : un petit coup de téléphone au directeur de service et comme par magie tout fut très simple et l’attente… quelle attente ?!!! OK ! J’ai eu droit à des regards assez sévères de la part de certains touristes ou travailleurs étrangers qui ne l’ont pas eue aussi facile, mais bon! Vous vous demandez si j’ai eu un cas de conscience avec toute cette aventure? Et bien oui! C'est comme ça, la vie est à ce point injuste et les contacts donnent très souvent un coup de main plutôt difficile à refuser! N'auriez-vous pas fait pareil?!

Édition: Isabelle Adjahi

Retour vers Bamako


Comme vous avez pu le lire, c’est avec un brin de nostalgie que je quitte le pays Dogon pour retourner à Bamako. Toutefois, ce retour ne s’est pas déroulé sans histoire! Je vous raconte. Juste avant de me préparer à quitter, j’ai emprunté la moto d’Amaghana, histoire de faire quelques emplettes pour le trajet du retour qui doit durer une quinzaine d’heures.


Au retour vers l’hôtel, je m’engage tranquillement dans le rond point de la place centrale de Bandiagara. Je n’ai pas vue l’agent de police qui est situé de l’autre côté et en passant devant lui, il me siffle et me fait signe d’arrêter, requête à laquelle j’obtempère sur le champ. Il me demande la vignette de la moto et comme vous pouvez imaginer, je n’ai aucune idée de ce dont il parle..! Devant notre impossibilité de nous comprendre, c’est à pied que je finis ma course de quelques centaines de mètres... car monsieur l’agent a décidé de saisir ma moto..!


Un petit appel à Amaghana qui vient me rejoindre. Je lui explique ce qui vient de se passer à quoi il me répond de ne pas m’en faire, qu’il sera de retour sous peu. Au bout de trente minutes, il se pointe avec sa moto et il semble que tout est rentré dans l’ordre. Il m’explique que l’amende pour se faire prendre sans vignette est de 12 500 CFA et qu’il faut par la suite acheter la vignette qui coûte 6 000 CFA. Par contre, en refilant un billet de 2 000 CFA à ce gentil gardien de la paix, il a pu récupérer sa moto sans aucun problème.


Ici on dit «c’est ça l’Afrique , mais je dois admettre que je rageais un peu de l’intérieur surtout que lorsqu' il a confisqué la moto, j'ai remarqué qu'il y en avait déjà une bonne douzaine sur le terre plein à côté de lui... Par contre, Amaghana m’a fait voir la situation un peu différemment : selon lui, cet agent de la paix a une famille proche étendue et son salaire de policier n’est probablement pas suffisant pour subvenir à leurs besoins. Il m’a aussi dit qu’il connaissait l’agent et que malgré les apparences, il est quelqu’un de généreux. Enfin, il a reconnu que si lui, Amaghana, avait acheté sa vignette en premier lieu, il n’aurait pas eu à payer ce 2 000 CFA. C’est un fait… De ce point de vue, on peut le voir comme un système de péréquation. Il est certain que ce n’est pas parfait, mais après tout dans la vie les choses ne sont pas juste noir ou blanc…


C’est donc sur cette note un peu amère que je prends le taxi-brousse vers Cévaré ou attend le bus qui part vers Bamako. Le départ prévu pour 15 h est retardé et il est presque 17 h quand nous prenons enfin la route. Le monde du transport en autobus en Afrique est assez particulier, il y a les gens qui prennent leurs billets au terminal et il y a les autres. Pour ma part, j’ai acheté mon billet au guichet ou on m’a donné un reçu qu'au moment de monter à bord je dois remettre au responsable. Jusque-là tout est ce qu’il y a de plus normal. Par contre, une fois que le chauffeur prend la route, on a pas fait 1 km qu’il s’arrête sur le bord du chemin pour faire embarquer d’autres passagers. Et oui, vous l’avez bien deviné: ce sont les autres ; ceux qui essaient d’épargner quelques francs et qui traitent directement avec le chauffeur… «c’est ça l’Afrique»!


Le trajet initialement prévu pour durer huit heures dura malheureusement beaucoup plus longtemps, à cause de tous ces arrêts supplémentaires. Cette fois j'avais décidé de ne pas prendre la même compagnie de transport que j’avais utilisée pour me rendre à Tombouctou et réflexion faite, je crois que j’aurais mieux fait de continuer avec le même transporteur. L’autobus est sale et derrière moi il y a une dame qui transporte un gros sac de poissons séchés. Quand on roule ce n’est pas si mal mais aussitôt l’autobus à l’arrêt, une odeur de poisson pas trop frais m’envahit et me donne chaque fois l’envie de gerber… Le trajet promet d’être long...


Il est 4 h 30 du matin quand nous arrivons finalement à Bamako et comme je ne veux pas me casser la tête, je décide de me prendre une chambre à l’hôtel Salam; le grand luxe après une semaine dans le désert à coucher dans un lit pas trop confortable et à utiliser une toilette turque chaque matin. À la réception de l’hôtel je demande l’heure à partir de laquelle je peux réserver une chambre pour le lendemain. On me répond que le changement de date est à 7 h. Je demande alors si je peux attendre dans le lobby au lieu de payer une nuit au complet pour seulement 2h30 d'attente. Au bout de trente minutes, le type vient me voir et m’offre la chambre tout de suite, je crois qu’il m’a pris en pitié! Mais au diable la gêne! Je me fous un peu d’être pris en pitié puisque quelques minutes plus tard, me voilà enfin dans une belle chambe avec un bon lit, une toilette propre et le branchement internet. Je suis comblé!



C’est donc dans ce luxueux hôtel que j’ai terminé mon séjour à Bamako. Une petite visite chez Abou Baccar où j’ai rencontré sa famille, un souper avec Bouba et sa copine ainsi qu’un couple d’amis et me voilà parti vers d’autres contrées. C’est maintenant le Bénin qui m’attend.

Édition: Isabelle Adjahi

mercredi 15 avril 2009

La religion Dogon


Ce billet fait suite à l’article du 8 avril sur la religion animiste. Comme je l’ai déjà écrit, toute l’Afrique noire est à la base animiste et se retrouve sous une forme ou une autre ici. L’animisme n’est pas une religion révélée tel le que le christianisme, le judaïsme ou l’islam, elle serait plutôt une interprétation de l’équilibre entre l’homme et la nature. C’est pourquoi, il est impossible de parler d’animisme pour l’ensemble de l’Afrique, mais plutôt de tradition régionale.



Chaque peuple ou tribu a sa pratique religieuse qui adaptée à la réalité de sa région.
La religion Hogon par exemple, est très différente de la vision animiste des casamançais. D’abord, le chef spirituel des Dogons s’appelle le Hogon et habite dans la falaise dans la petite maison sur la photo, comme le veut la tradition. Le Hongo est très facilement déterminé: il s'agit tout simplement de l’homme le plus vieux du village. À la mort du Hogon, la légende dit que le bâton sacré de ce dernier se téléporte dans la case qui appartient à la famille représentée par le plus vieil homme du village encore en vie. Cet homme devient le nouvel Hogon et même s'il vit dorénavant à l’extérieur du village, il est de sa responsabilité de revenir au village et d’assumer le rôle de Hogon. S’il refuse un mauvais sort sera jeté sur toute sa famille qui sera reniée par le reste du village. À ce jour, aucun futur Hogon n’a refusé d’assumer son rôle, la pression familiale étant trop grande.



Le Hogon ne peut se laver avec de l’eau car pour lui il s'agit d'une eau impure; seule la langue du serpent peut purifier le Hogon. Les contacts avec le chef spirituel sont rares et limités aux célébrations habituelles comme celles de la pluie, de la fécondité, des funérailles, des incantations pour rétablir l’équilibre, etc. Aussi, le Hogon ne se nourrit que des aliments préparés par une vierge.



Dans la religion Dogon, une attention particulière est apportée aux femmes qui ont leurs règles. Les femmes menstruées, logent dans une petite maison ou toutes les femmes doivent vivre du début à la fin de leurs menstruations. Si une femme sort de cette case durant cette période, un mauvais sort lui sera jeté et elle pourrait souffrir d’infertilité ou de maladie voire mourrir.



Comme vous pouvez le constater, l'animisme d'ici est très différent de celui de la Casamance, mais les bases restent les mêmes. Bien que certaines de ces croyances soient complètement naïves d’un point de vue occidental de 2009, les gens du Pays Dogon étant très superstitieux, ces rites sont encore bien ancrés dans le quotidien. Fait intéressant à noter, cette attitude face à la religion ne nous est pas si inconnue. On a qu'à regarder les traditions et coutumes des premières nations autochtones des Amériques pour y voir une certaine similarité.



Édition : Christine Adjahi née Gnimagnon

Le Pays Dogon


Dimanche le 5 avril, la santé s’améliore un peu et je négocie un contrat de visite du Pays Dogon avec Cheik Omar. Ce ne sera pas lui qui me servira de guide mais le prochain en ligne car avec l’association des guides du Pays Dogon, il y’a un ordre à suivre. Mon guide sera donc Amaghana Guindo et pour 55 000 CFA (140$ Can) je m’achète un package deal tout comprit de deux jours, transport, hôtel, bouffe, breuvage. Il est certain que ce n’est pas le Ritz, limo, gastronomie et pauillac mais la mobylette fonctionne, le matelas déposé sur le sol est bien, la bouffe de la région est très bonne et je bois de l’eau minérale.

Le trajet pour ce rendre n’est que de 20 km et j’ai insisté pour prendre le volant. Le Pays Dogon se situe majoritairement au bas de la falaise de Bandiagara qui s’étend sur quelques 200 km et de 300 à 700 mètres de hauteur. Notre premier arrêt est le village de Djiguibombo qui lui, se situe sur le plateau en haut de la falaise. Bâti sur du rock il n’est pas possible pour ces villageois de construire tout avec de l’argile, c’est pourquoi toute les clôtures sont faite de pierres. Les petites huttes rondes ne sont pas les maisons mais plutôt les greniers pour entreposer la nourriture.


Nous continuons notre chemin sur la route qui longe une faille pour se rendre à la base de la falaise. Deuxième arrêt, le village Kani-Kombolé, ma première vue de cette magnifique falaise ainsi que les premières maisons dans la falaise. D’abord un peu d’histoire sur les Dogon, la région compte près de 50 petits villages de deux à trois mille habitants chacun. Pour être certain de rendre le tout compliqué, chaque village à son propre dialecte, donc d’essayer d’apprendre à parler le Dogon est un exercice futile. La salutation dans le dialecte de Amaghana est comme suit : agapo (bonjour), réponse, agapo ; sewa (ça va), réponse, sewa ; guini-sewa (la famille ça va), réponse, sewa ; et puis l’interlocuteur recommence ; sewa, réponse, séwa ; guini-sewa, réponse, séwa ; et les deux finissent par ho. La première fois que j’ai entendu c’était assez particulier.


Les Dogons, un peuple d’agriculteur, se sont installés dans la région il y’a plus de six siècles. Ce ne sont pas eux qui ont eu l’idée de construire les villages dans la falaise mais plutôt les Telmes (prononcé Tèlem) qui s y étaient installés il y a plus de douze siècles. Les Telmes vivaient de la chasse et des fruits qu’ils trouvaient dans les arbres de la vallée. Ils avaient élu domicile dans la falaise car c’était le meilleur moyen pour voir venir le danger, c'est-à-dire les fauves, les hyènes ou les ennemis. Les Dogons sont arrivés et ont défriché les forêts pour en faire la plaine que l’on retrouve aujourd’hui. Selon mon guide les deux peuples ont vécu en harmonie ensemble puis les Telmes sont tout simplement parti car ils ne pouvaient plus vivre de la chasse. Mon interprétation serait différente, les Dogons ont habité les maisons dans les falaises mais ne les ont pas construites, ce sont les maisons et les greniers Telmes qu’ils ont occupé. Je serais porté à croire que le départ vers le sud des Telmes fut plutôt forcé et non volontaire car il est très rare de voir un peuple abandonner tout bonnement son territoire. Par contre quand j’ai questionné mon guide, selon lui, l’histoire fut une transition paisible.


Troisième arrêt, le village de Teli, où l’on retrouve le plus grand nombre de constructions dans la falaise. Vraiment le Pays Dogon devrait faire parti de la liste des 100 choses à voir avant de mourir, Définitivement mon deuxième coup de cœur en Afrique après la Casamance. Au village de Teli nous avons grimpé la falaise pour nous rendre sur les lieus des petites maisons. Les Dogons ne sont pas restés très longtemps dans la falaise, il était très difficile de monter l’eau et les réserve de nourriture dans les hauteurs. Ils ont donc décidé de construire les villages actuel aux pieds de la falaise, par contre chaque famille Dogon détient et entretient toujours sa case dans la falaise, histoire de garder les traditions, par contre très peu de Dogons habitent encore la falaise.

Quatrième arrêt, le village d’Ende, où nous allons passer la nuit. Très similaire au village précédent de Teli, mais la spécialité du village est la teinture de tissu qu’ils exposent sur les murets de terre. Ce village est vraiment beau et une ambiance de fête y règne. D’ailleurs nous sommes en période d’initiation des petits garçons, c’est le temps de la circoncision, le passage au stade d’homme. Tout les initiés sont gardes dans une grande salle communautaire et ils chantent et dansent jusqu’aux petites heures du matin, le rituel dure 2 semaines. Pour ce qui est de la circoncision des fillettes, l’excision, une campagne de conscientisation financée par plusieurs ONG avec l’appui du gouvernement malien donne de très bons résultats et bien que plusieurs femmes fassent encore exciser leur petite fille, la pratique est en baisse et le dialogue sur le sujet est maintenant rendu possible.

Après un bon repas et une petite sieste, nous partons à l’ascension pour visiter les habitations dans la falaise, la maison du Hogon de Ende et la vue magnifique sur la plaine. Les prise de vue son à couper le souffle. On aurait du voir le Hogon mais il était absent, quel dommage. Retour au campement, une douche et puis c’est le diner qui nous est servi sur la terrasse au clair de lune. Comme je l’ai lu dans mon guide, je décide donc de dormir à la belle étoile, bien étendu sur le matelas les écouteurs de mon I-Pod dans les oreilles, je suis incapable de dormir. Je pense à vous tous, Roxanne, j’aimerais t’avoir à mes côtés, à ma famille et mes amis, le Pays Dogon c’est définitivement à vivre.

Réveil avec le lever du soleil, j’ai du dormir que deux heures mais je me sens bien. C’est l’éveil du village d’Ende, les gens partent les feux pour chauffer l’eau et une petite odeur de charbon commence à prendre le dessus sur la tranquillité du matin. Le soleil prend toute ça place et chasse les quelques nuages qui se font attendre, une autre journée parfaite en Afrique. Un autre petit tour de village et puis c’est le chemin du retour, pas déjà, mais je reviendrai, c’est promis.



Édition : Christine Adjahi née Gnimagnon

mardi 14 avril 2009

De Tombouctou à Bandiagara


Comme vous l’avez lu, ce n’est pas sans difficulté que je me suis rendu à Tombouctou; cette ville mythique du bout du monde, située aux portes du désert et qui fait depuis des lunes, rêver les plus grands voyageurs. Et bien laissez-moi vous dire que je ressors un peu déçu de cette visite. Je dois reconnaitre que l’on m’a reçu comme un roi et que le temps passé avec Hamadou et sa famille n’a pas de prix. Sans compter la visite du centre AEDT qui s’inscrit très bien dans mon voyage. Mais par contre, pour ce qui est de Tombouctou, j’en garderai le souvenir d'une ville petite, grise, éloignée de tout, où il fait trop chaud et qui est beaucoup trop tranquille pour moi! Oui je peux maintenant dire que j’y suis allé, mais une chose est certaine, je n’y retournerai pas sans obligation!

Je quitte donc la ville dans un état un peu quelconque pour me rendre à Bandiagara; petit village situé aux portes du Pays Dogon. C’est de là que je planifierai mon excursion au sein de ce petit joyaux classé patrimoine mondial par l’Unesco. Et oui, je dois me retaper le trajet, mais inverse. Je prends encore une fois un 4x4 pour traverser le désert, mais cette fois, pas fou je me réserve une place à l’intérieur, les fesses posées sur un vrai banc! J’en ai fini de galérer dans les boîtes de « pick-up ». (voir billet du 11 avril, "Se rendre à Tombouctou") !

Départ de Tombouctou vers 4 h du matin. La route est toujours aussi mauvaise et on met 10 h pour se rendre à la gare routière de Sévaré d’où je dois prendre un taxi-brousse pour me rendre à Bandiagara. Je vous expliquais que les taxis sont de vieilles Peugeot 505 avec sept bancs que l’on nomme « un 7 places » au Sénégal. Et bien au Mali ce sont des 9-10-11-ou-12 places et il faut attendre que la voiture soit pleine pour quitter. Il est donc tout à fait inutile de tenter de prévoir l’heure à laquelle on arrivera à destination.


J’arrive à Bandiagara quelques heures plus tard et je décide de loger à l’Hôtel La Falaise. C’est joli, propre et coup de bol, il y’a un siège de toilette! Je décide donc de me prendre une petite chambre ventilée pour 14 000 CFA, ce qui est très raisonnable. Je suis fatigué de la route et malade car j’ai débuté un autre traitement d’antibiotique avant de quitter Tombouctou. La poussière et les changements de température on eu le dessus sur moi et je crois qu’une autre laryngite va faire son travail.

Aussitôt débarqué du taxi brousse, comme d’habitude, tout le monde est mon ami et veut me rendre service. C’est donc dans ce contexte que je rencontre Cheik Omar qui est déterminé à m’organiser mon voyage au Pays Dogon. Par contre Cheik est loin de se douter que je ne suis plus un amateur et que cette fois je ne décide plus rien sur le champs. Je vais le faire languir, je vais négocier et surtout j’irai voir la compétition avant de prendre ma décision finale.



Avec toute l’information nécessaire je m’enferme dans ma chambre malade comme un chien, car à ce point ma laryngite est à son paroxysme. Ce n’est que deux jours plus tard que je ressors de mon antre en meilleure forme et prêt à partir à la découverte du Pays Dogon.
Édition: Isabelle Adjahi

ONG Aide aux Enfants Démunis de Tombouctou (AEDT)


Je vous présente « Aide aux Enfants Démunis de Tombouctou », l’ONG de Hamadou, un organisme né en 2002 de la seule vision d’un gars qui a décidé de s’impliquer pour tenter de faire une différence. Jusqu'alors, Hamadou était photographe et avait son propre commerce. Il avait une très bonne situation et la vie semblait lui sourire à pleines dents. Jusqu'au jour où un événement est venu bouleverser le cours de sa vie et où plus rien n’a jamais été pareil.

Durant la saison des pluies, un déluge a fait des ravages sur Tombouctou. Pendant trois jours et trois nuits il est tombé des cordes sur la ville. Les habitants ont dû déserter la place centrale du marché pour se réfugier tant bien que mal à l’intérieur des terres. Personne n'a vu le fou du village qui était resté seul au milieu du marché désert. Aussi, pour essayer de se protéger, il trouva refuge sous un abri du marché. Au bout de trois jours la pluie cessa et les gens de Tombouctou revinrent dans le but de reprendre leurs activités normales. Le grand ménage s’amorça et c’est au moment de soulever les tôles des toits des kiosques qu'on fit la macabre découverte. On alla chercher Hamadou, puiqu'il était le photographe, pour lui demander de prendre des photos de la scène pour le médecin légiste.

Ce fut là l’élément déclencheur qui lui fit voir la vie d’un autre œil. Sa vie serait dorénavant consacrée au travail social et c'est là qu'AEDT a vu le jour quelques mois plus tard. Hamadou a vendu ses biens et s’est constitué un fond de démarrage qui a permis à l’ONG de voir le jour. Il a ensuite donné à l'organisation une de ses maisons, qui sert maintenant de centre pour les enfants de la rue, de siège social pour l’ONG, de salle de classe et de terrain de jeu. AEDT a trois missions bien distinctes et tâche de relever de front ces trois défis.

Le premier point du programme de l'AEDT touche les jeunes scolarisables, c'est-à-dire les enfants de 5 à 9 ans qui n’ont reçu jusque là aucune scolarisation. Ces enfants sont souvent nés de parents indigents (sans papiers) ou de familles n'ayant pas les moyens de payer l’éducation de leurs enfants. Le Centre les prend donc en charge et les aide à s’intégrer dans au milieu scolaire. Au centre, on aide également les parents à obtenir les actes de naissance de leurs enfants pour permettre leur inscription à l’école. Une aide financière peut également être accordée aux parents pour payer les frais de scolarité ou les fournitures scolaires. Si un jeune n’est pas au niveau en mathématique en lecture ou en écriture, le Centre donnera enfin des cours d’appoints.

Le deuxième point du programme touche les jeunes travailleurs. Ils ont entre 9 et 18 ans et ne savent ni lire ni écrire, car ils ne sont jamais allés à l’école et sont trop vieux pour être intégrés au système scolaire normal. Le travail du Centre, dans ce cas, est de déterminer la volonté des jeunes à se prendre en main. À ceux qui se montrent sérieux, le Centre permet de déterminer un métier possible puis d'entreprendre une formation. L’objectif étant de faire vivre à chacun un stage dans un atelier auprès d'un maître qui lui apprendra un métier. Aussi, fait important à noter, les droits de base de l’enfant se doivent d'être respectés pour éviter que ces jeunes ne soient utilisés comme de la main d’œuvre bon marché. Pour ce faire, un programme est déterminé et les orienteurs du Centre font un suivi pour s’assurer que les droits de chaque enfant sont respectés. De plus, les jeunes peuvent suivre des cours au Centre, histoire d’apprendre à lire et à écrire dans un contexte amical et convivial. À la fin de la formation, le Centre offre également de venir financièrement en aide aux jeunes désireux de démarrer leur petite entreprise. Le micro crédit est alors utilisé pour apprendre comment gérer un budget et planifier l’avenir de leur petite entreprise.

Le troisième point du programme touche les talibés, ces gamins (majoritairement des garçons) qui vont à l’école coranique. Mohamed m’a expliqué la relation marabout/talibé d’une manière différente de celle que j’avais vue exposée précédemment (voir billet du XXX). Les maîtres coraniques vont de village en village et ramènent entre 30 et 50 petits garçons dans leur ville dans le but de faire leur éducation coranique et spirituelle. Comme le marabout est souvent seul et de ce fait a peu de moyen, il demande aux jeunes sous sa tutelle d’offrir leurs services au voisinage (tâches ménagères et petits services, en échange de nourriture ou de quelques pièces). Cette manière de faire peut facilement ressembler à de l'abus pour nous, mais il ne faut pas s'y méprendre. Comme dans toute chose, il y a les gens pleins de bonnes intentions et il y a les autres. Et bien que certains marabouts ne soient vraiment pas des exemples idéaux de chef spirituel selon Hamadou, reste que ceux qui le sont, sont très importants dans le système éducatif du Mali.

D'autre part, le Centre offre trois services spécifiques aux talibés soit: 1) un système volontaire et anonyme accessible aux enfants victimes d'abus; ce qui leur permet de dénoncer sans risque un marabout aux comportements abusifs. Le rôle du Centre étant alors d'aider à retourner les enfants concernés dans leur famille ; 2) sont également proposées des activités de formation aux marabouts afin de leur permettre d’éduquer les talibés au-delà du simple apprentissage du Coran. Ces marabouts aux connaissances élargies deviennent alors des maillons forts du système éducatif ; 3) finalement, le Centre offre aux écoles coraniques certains services alimentaires en plus d'offrir des soins de santé de base.

Ici le volontariat est à la base de tout. Personne n’est forcé de participer à un programme et tous ceux qui se montrent intéressés doivent démontrer clairement leurs motivations à poursuivre leurs études ou à apprendre un métier avant d'être admis.
Finalement, cette petite ONG qui est partie de presque rien est venue en aide et a permi l’éducation de base à plus de 100 jeunes l’an dernier. Voilà donc, encore une fois, un exemple qui vient prouver que les petits projets sans grandes ressources peuvent avoir des impacts à long terme énormes dans la vie des enfants et indirectement dans l'amélioration de la qualité de vie des villageois en général. Chapeau!

Édition: Isabelle Adjahi

L’hospitalité de Tombouctou

Aussitôt arrivé en ville, Hamadou vient me chercher au bureau de la direction générale où le commandant a établi son campement pour la nuit avant de poursuivre son voyage l’aube venue. Sur sa petite moto flanqués de mes sacs, nous arrivons chez lui. Dans sa coquette petite maison de briques d’argile, située littéralement aux portes du désert du Sahara, nous attendent sa femme et leur petit. Après ce voyage particulièrement mouvementé, la seule chose qui me préoccupe est d'enfin me laver. Car, après mon voyage dans la boîte du camion, premières loges pour « apprécier » les retours de poussière de terre rouge, j’ai littéralement changé de couleur. En d’autres termes, je suis crotté!



Après les présentations, je ne perds pas de temps et demande où je peux aller prendre une douche. « C’est au fond de la cour, tout est prêt » me dit Hamadou, en me pointant l'endroit du doigt. C’est donc très enthousiaste que, muni de ma petite trousse et d'une serviette, je me dirige vers la petite pièce. J’entre, je ferme la porte et me retrouve nez-à-nez avec un gros seau d’eau froide, un arrosoir et un gros trou pour… Je comprends alors que je suis vraiment à Tombouctou, mais je me rends surtout compte que certaines choses que l’on prend pour acquises chez nous, sont ailleurs, de vrais petits luxes. Et je ne vous cacherai pas que ces petits luxes sont pour moi indispensables; je ne suis du moins pas prêt de m’en passer pour une trop longue période.



C'est donc, tout propre que je rejoinds à la cuisine Hamadou et Mohamed un collègue, où une intéressante discussion s’ammorce pendant que Kadi, l'épouse d'Hamadou, nous prépare à diner. Hamadou m’explique en quoi consiste ses activités et comment il est venu à créer son ONG. De mon côté, je lui explique le pourquoi de ma présence en Afrique. Bien que nous ayons des parcours complètement différents et qu’un monde de différence nous sépare, nous nous rendons rapidement compte que nos visions se ressemblent étrangement.

Kadi nous sert le diner que nous mangerons à l’africaine, c'est-à-dire, assis par terre dans le salon, en rond autour des plats disposés au centre. Mais, il faut d'abord se laver les mains avec un petit arrosoir et du savon puis nous pouvons commencer à manger avec les mains en pigeant ici et là dans les plats communautaires. Fait à noter : seuls les hommes sont admis dans le cercle pour déguster le repas. Notre discussion se poursuit tard dans la nuit au cours de laquelle nous abordons plusieurs sujets tels que la religion, la situation des femmes, l’éducation, la vie à Tombouctou, etc.


Édition: Isabelle Adjahi